Les relations d’affaires peuvent conduire à des impayés, mais le créancier n’est pas démuni. Il peut faire procéder à des mesures d’exécution comme une saisie immobilière pour se faire payer. Elle fait suite à une décision de justice qui reconnaît la créance. Comment peut-il la déclencher ? Comment se passe-t-elle ? Quels sont ses effets ?
L’ESSENTIEL
➜ Ce que dit la loi : le débiteur répond des obligations sur tous ses biens meubles et immeubles (art. 2284 C. civ.). Les immeubles peuvent donc faire l’objet d’une saisie (art. L. 311-1 et L. 311-2 Code des procédures civiles d'exécution) pour être vendus.
➜ Délai pour agir : 10 ans pour exécuter une décision de justice. À compter de la délivrance du commandement de payer qui suit la décision, le débiteur dispose de 8 jours pour payer. À défaut, son immeuble pourra être saisi (art. L. 111-4 et R. 322-1 C. proc. civ. ex.).
➜ Procédure simplifiée : pour recouvrer des créances professionnelles impayées, le créancier peut initier une procédure de recouvrement amiable puis judiciaire en étant accompagné par Litige.fr tout au long de la procédure.
CADRE & PRINCIPES
Qu’est-ce qu’une saisie immobilière ?
Il s’agit de la saisie qui porte sur un immeuble. Cette exécution forcée a pour finalité sa vente afin de payer les créanciers du débiteur qui en est propriétaire.
Qui peut engager une telle opération de saisie d'une créance ?
C’est le créancier qui va pouvoir l’engager. Cette saisie-vente sera réalisée par l’intermédiaire d’un huissier de justice (art. L. 311-2 C. proc. civ. ex.).
Il doit être muni d’un titre exécutoire constatant l’existence d’une créance certaine (incontestable), liquide (évaluable en argent) et exigible (dont la date de paiement est échue) (même article).
Quels biens peuvent être saisis ?
Elle porte sur un immeuble comme un terrain ou encore un bâtiment (art. 518 C. civ.) ou tout ce qui y est scellé ou placé pour les besoins de l’exploitation d’une activité (art. 542 C. civ.) :
- Tous les biens immobiliers peuvent être saisis (L. 112-2 C. proc. civ. ex.).
- Tous les droits réels afférents aux immeubles sont concernés (art. L. 311-6 C. proc. civ. ex.), c’est-à-dire tous les droits qu’une personne possède sur un bien comme un bail emphytéotique (très longue durée, art. L. 451-1 CRPM) ou un bail à construction (art. L. 251-3 C. const.).
Certains biens ne peuvent pas en faire l’objet.
Les biens immobiliers insaisissables
Pour l’entrepreneur individuel (art. L. 526-1 C. com) :
- Sa résidence principale est toujours insaisissable ;
- Les biens de son patrimoine personnel qu’il a déclarés insaisissables dans le cadre de son activité professionnelle.
💡L’entrepreneur individuel est la personne physique qui exerce une activité artisanale, agricole, libérale ou encore commerciale sans être immatriculée sous la forme d’une société (art. L. 526-1 C. com.).
⚠️Si l’immeuble concerné est composé d’immeubles par destination (art. 524 C. civ.) ; ceux-ci peuvent toujours être saisis indépendamment (art. L. 112-3 C. proc. civ. ex.).
Le mineur non émancipé ou le majeur protégé (art. L. 311-7 C. proc. civ. ex.). Leurs immeubles ne peuvent pas être saisis avant que leurs meubles l’aient été.
PROCÉDURE
Comment se déroule une saisie immobilière ?
Plusieurs étapes doivent être respectées pour aboutir au paiement des créanciers. La procédure rend le bien indisponible.
1 - L’assignation à comparaître du débiteur
La saisine est subordonnée à l’obtention d’un titre exécutoire, comme une décision de justice (art. L. 311-2 C. proc. civ. ex.). C’est la raison pour laquelle le débiteur doit être assigné devant le Juge lorsqu’il ne règle pas sa créance. En d’autres termes le créancier va dans un premier temps saisir le Juge pour obtenir la reconnaissance de sa créance.
⚠️ Un contrat ne peut pas prévoir que le créancier pourra saisir les immeubles de son débiteur en dehors du cadre des procédures civiles d’exécution. Il serait nul (art. L. 311-3 C. proc. civ. ex.).
Celle-ci comporte un certain nombre de mentions obligatoires (article R322-5 C. proc. civ. ex.) telles que :
La sommation de prendre connaissance des conditions de la vente figurant dans le cahier des conditions de vente qui peut être consulté au greffe du Juge de l'exécution où il sera déposé le cinquième jour ouvrable au plus tard après l'assignation ou au cabinet de l'avocat du créancier poursuivant ;
L'indication, en caractères très apparents, qu'à peine d'irrecevabilité, toute contestation ou demande incidente est déposée au greffe du Juge de l'exécution par conclusions d'avocat au plus tard lors de l'audience...
2 - La délivrance d'un commandement de payer valant saisie immobilière
Pour procéder aux opérations de saisie, il faut délivrer un commandement de payer valant saisie (art. R. 321-1 C. proc. civ. ex.).
En effet, à la suite de la décision de justice qui constitue le titre exécutoire du créancier, le commissaire de justice (anciennement huissier) doit délivrer un commandement de payer valant saisie immobilière.
Cet acte doit comporter les mentions :
- Exigées pour tout acte d’huissier des articles 45 et 648 CPC ;
- Celles de l’article R. 321-3 C. proc. civ. ex telles que : la mention informant le particulier débiteur de sa faculté à saisir la Commission de surendettement des particuliers s'il s'estime en situation de surendettement...
💡À compter de la délivrance de cet acte de saisie, le débiteur dispose de 8 jours pour régler sa créance. À défaut, la procédure de saisie immobilière pourra être poursuivie par un huissier (art. R. 321-3, 4° et R. 322-1 C. proc. civ. ex.).
3 - La visite du commissaire de justice
Au-delà du délai de 8 jours. Si le débiteur ne paie pas, le commissaire de justice va le visiter pour établir un procès-verbal décrivant le bien saisi.
La saisine par le créancier impose l’intervention d’un huissier qui va la signifier au débiteur ou au tiers acquéreur (art. L. 321-1 C. proc. civ. ex.).
⚠️Le créancier ne peut saisir qu’un seul immeuble du débiteur, sauf s’il ne suffit pas à le désintéresser (art. L. 311-5 C. proc. civ. ex.).
Une publication au fichier immobilier du bureau des hypothèques est nécessaire pour rendre la saisie opposable aux tiers (art. L. 321-5 C. proc. civ. ex.)
Dans les 2 mois suivants la publication du commandement de payer, le créancier doit assigner le débiteur devant le Juge de l'exécution (JEX) qui décidera des modalités de vente de l’immeuble (art. R. 322-4 C. proc. civ. ex.).
Il doit y procéder par assignation à comparaître (acte d’huissier), dans un délai d’1 à 3 mois avant l’audience (même article). Sinon, le commandement est caduc (il ne produit plus d’effets), (art. R. 311-11 C. proc. civ. ex.).
⚠️Si 5 ans après la délivrance du commandement, aucune inscription de vente n’est réalisée, il cesse de produire effet. La procédure doit être recommencée (art. R. 321-20 C. proc. civ. ex.).
4 - L'audience d'orientation
La saisie immobilière se poursuit durant l'audience d'orientation devant le JEX du lieu de l’immeuble (art. R. 311-2 C. proc. civ. ex.) et l’avocat est obligatoire (art. R. 311-4 C. proc. civ. ex.).
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⚠️Si la décision de justice qui permet la poursuite du créancier n’est pas définitivement exécutoire, il faudra attendre une autre décision dont le caractère exécutoire devient définitif pour procéder à la vente forcée (art. L. 311-4 C. proc. civ. ex.).
💡Une décision est exécutoire lorsqu’elle passe en force de chose jugée, et n’est donc plus susceptible de recours suspensif (art. 504 CPC). Les décisions de justice sont immédiatement exécutoires en matière civile, sauf exception ou décision contraire du Juge (art. 501, 504, et 514-1 CPC).
Lors de cette audience d’orientation le Juge va décider des conditions de la vente immobilière. Il peut demander la vente amiable de l’immeuble ou aux enchères publiques (art. L. 322-1 C. proc. civ. ex.).
⚠️Le prix de la vente de l’immeuble ne pourra être réclamé que par les créanciers inscrits sur le bien saisi à la date de la publication du commandement de payer, ceux disposant d’un privilège immobilier ou encore les syndicats de copropriétaires titulaires d’une hypothèque légale (art. L. 331-1 C. proc. civ. ex.).
A - La vente amiable
Elle produit les effets d’une vente volontaire, dont le prix de la vente dépendra des parties (art. L 322-3 C. proc. civ. ex.).
B - La vente forcée
Il s’agit de celle dite aux enchères. Elle a lieu lors d'une audience d'adjudication du Juge (art. L. 322-5 C. proc. civ. ex.).
Le montant de la mise à prix est fixé par le créancier poursuivant (art. L. 322-6 C. proc. civ. ex.).
Quels sont ses effets ?
Elle a pour finalité la vente forcée de l’immeuble du débiteur (art. L. 311-1 C. proc. civ. ex.)
L’immeuble est rendu indisponible (art. L. 321-2 C. proc. civ. ex.). Cela signifie que le débiteur ne peut pas le vendre ni le grever de sûretés (même article).
💡C’est seulement à partir de la délivrance d’un commandement de payer valant saisi et publié que le bien devient indisponible (art. R. 321-13 C. proc. civ. ex.).
Les fruits de l’immeuble (par exemple des loyers) sont également saisis (art. L 321-3 C. proc. civ. ex.).
Comment arrêter une saisie immobilière ?
Il faut déposer des conclusions au greffe du Juge en contestant sa régularité ou encore son bien-fondé.
Qui peut engager une procédure de saisie immobilière ?
Le créancier impayé muni d’un titre exécutoire peut engager une procédure de saisie immobilière.
Comment éviter une saisie immobilière ?
Il est possible de réaliser une vente à réméré, permettant de vendre son bien temporairement.