Les situations du quotidien sont remplies de désagréments allant de la simple altercation verbale au travail, à un retard d’indemnisation, aux nuisances sonores en passant par la divulgation de fausses informations par un voisin portant atteinte à l’honneur. Elles ont toutes en commun de potentiellement générer un préjudice moral. De quoi s’agit-il ? Quand est-il possible de demander réparation ? L’article fait le tour de ces questions.
L’ESSENTIEL
➜ Ce que dit la loi : tout fait quelconque de l’homme qui cause un dommage à autrui oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer (art. 1240 du Code civil). Si un dommage est causé dans le cadre d’une relation contractuelle, une obligation de réparation s’impose aussi (art. 1231-1 du Code civil), et ce même si le préjudice est moral (Cass. civ. 2, 5 janvier 1994, n° 92-12.185).
➜ Délai pour agir : Pour agir en matière civile, le délai de prescription est, en principe, fixé à 5 ans (art. 2224 du Code civil). Il passe à 10 ans pour un événement qui a engendré des dommages corporels et d'autres qui en résultent, comme un préjudice moral (art. 2226 du Code civil).
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Qu’est-ce qu’un préjudice moral ?
Un préjudice moral (ou dommage moral*) se définit comme un préjudice tel que l’atteinte à l’honneur ou encore aux sentiments d’une personne.
*Une partie de la doctrine juridique distingue le dommage du préjudice en ce sens que ce dernier serait le dommage qui remplit les critères de réparabilité (direct et personnel, certain, légitime).
Préjudice moral : définition
Le préjudice moral se définit comme un préjudice immatériel que subit une personne physique ou morale*, qui porte par exemple atteinte à son honneur/sa réputation, à sa vie privée ou encore à ses sentiments (comme lorsqu’elle perd un être cher). Il fait référence à des souffrances psychiques ou des souffrances endurées à la suite d’une blessure physique (Cass. civ. 2, 5 janvier 1994, n° 92-12.185).
*La Cour de cassation estime que les personnes morales n’ont pas de droit au respect de leur vie privée (Cass. civ. 1 17 mars 2016, n° 15-14.072). En revanche, les personnes morales peuvent subir un préjudice moral d'une autre nature (Cass. com., 15 mai 2012, n° 11-10.278).
💡 Le Conseil d’État adopte une position inverse reconnaissant un droit au respect de leur vie privée aux personnes morales de droit privé (CE, 7 octobre 2022, n° 443826).
Exemples de préjudices moraux
Par exemple constituent des préjudices moraux :
- L’atteinte à la vie privée ou à l’intégrité ou à l’honneur d’une personne (Cass. soc., 2 décembre 2015, n° 14-24.546) ;
- Les souffrances endurées à la suite d’une blessure (Cass. civ. 2, 16 septembre 2010, n° 09-69.433) ;
- La souffrance psychique endurée à la suite de la perte d’un proche, qui est également appelé préjudice d’affection (Cass. crim., 20 mars 1996, n° 95-81.168) ;
- L’anxiété générée à cause d’un voyage annulé, d’un vol annulé à condition de mettre en évidence qu’elle a abouti à de véritables souffrances psychiques (stress du retour, relogement, etc.) ;
- Les troubles anormaux du voisinage qui occasionnent des bruits le dimanche portant atteinte à la tranquillité d’esprit et générant, là encore, des souffrances psychiques qu’il convient de mettre en évidence.
💡Pour être indemnisable, le préjudice moral, quelle que soit sa nature, doit être certain, direct et personnel ainsi que légitime.
Quel est le montant d’un préjudice moral ?
Le montant du préjudice moral va dépendre de la qualité de victime (directe ou par ricochet*), mais aussi de l’intensité de l’atteinte subie, ou encore de l’âge du bénéficiaire.
*c’est-à-dire, indirecte, lorsqu’elle est proche de la victime décédée.
C’est le juge qui détermine le montant du préjudice. Il existe des référentiels pour les y aider, comme le référentiel MORINET pour les préjudices moraux consécutifs à des dommages corporels. Il existe encore le barème indemnitaire de l’ONIAM si le préjudice fait suite à un accident médical.
➡️ Par exemple, selon le référentiel MORINET 2023, l’indemnisation pour un préjudice moral lié à des souffrances endurées peut être (car, il s’agit d’un guide pour les magistrats de l’ordre judiciaire qui restent souverains dans leur appréciation) :
- 1/7 très léger jusqu’à 2 000 euros ;
- 2/7 léger 2 000 à 4 000 euros ;
- 3/7 modéré 4 000 à 8 000 euros ;
- 4/7 moyen 8 000 à 20 000 euros ;
- 5/7 assez important 20 000 à 35 000 euros ;
- 6/7 important 35 000 à 50 000 euros ;
- 7/7 très important 50 000 à 80 000 euros.
Quand le préjudice moral est-il réparable ?
Le préjudice moral est réparable seulement s’il est certain, direct et personnel ainsi que légitime.
Un préjudice moral certain
Le préjudice moral sera certain dès lors qu’il est né et actuel ou qu’il n’est pas seulement hypothétique lorsqu’il est futur (Cass. civ. 3, 2 juin 2016, n° 15-16.967).
Un préjudice moral direct et personnel
Le préjudice moral est direct et personnel si la victime a été directement atteinte. La question est plus délicate lorsqu’une victime par ricochet (indirecte) demande réparation d’un préjudice moral.
💡La Cour de cassation rappelle que la victime indirecte doit également rapporter la preuve d’un préjudice certain, direct, personnel et légitime (Cass. mixte, 27 février 1970).
Un préjudice moral légitime
Pour ouvrir droit à réparation, le préjudice moral doit présenter un caractère légitime, autrement dit, il ne doit pas résulter d’une situation illicite ou illégale (Cass. civ. 2, 24 janvier 2002, n° 99-16.576).
Comment démontrer le préjudice moral ?
La démonstration d’un préjudice moral peut se faire par tout moyen, s’agissant d’un fait juridique (v. art. 1358 et 1100-2 du Code civil). Il pourra s’agir de rapporter des attestations médicales, psychologiques ou psychiatriques par exemple.
Comment est calculé le préjudice d’agrément ?
Le préjudice d’agrément est calculé en considération de la possibilité qu’a la victime de réaliser des activités depuis l’accident (avant et après accident).
Comment évaluer le montant d’un préjudice moral ?
L’évaluation du montant d’un préjudice moral dépend de nombreux facteurs (âge de la victime, intensité du préjudice, qualité de victime, etc.). Des référentiels sont mis en place pour aider les juges à statuer.