Réforme de la procédure d’injonction de payer : Quelles sont les dernières nouveautés en vigueur ?

Réforme de la procédure d’injonction de payer :
Thèmes :
recouvrement judiciaire, injonction de payer
Par Kahina KHADRAOUI Lu 3247 fois Publié le : 26/10/2022 Publié le : 26/10/2022


L’injonction de payer est une procédure de recouvrement judiciaire destinée à obtenir rapidement le paiement de factures impayées. Une réforme de cette procédure a eu lieu.


La matière a été bouleversée par les décrets n° 2021-1322 du 11 octobre 2021 et n° 2022-245 du 25 février 2022. Ces nouvelles règles entrées en vigueur le 1er mars 2022 apportent un renouveau à la procédure d’injonction de payer. Modernisation, simplification ou allégement de son accomplissement, voici ce que les décrets ont apporté.


L’ESSENTIEL

 Ce que dit la loi : l’injonction de payer est ouverte dès lors qu’une créance a une cause contractuelle, statutaire ou dans un outil de financement du crédit (art. 1405 CPC).

 Délai pour agir : la prescription d’une facture est quinquennale (art. 2224 C. civ.), sauf délais spécifiques prévus par la loi.

 Procédure simplifiée : Litige.fr donne les moyens au justiciable d’être accompagné dans toutes les étapes de mise en oeuvre de ce recours judiciaire pour recouvrer une facture impayée.

INJONCTION DE PAYER EN LIGNE

I - Les 3 évolutions liées à la requête d'injonction de payer

La requête est l’acte qui introduit la procédure. Ses formalités sont revues pour plus de transparence.

1.1 - La requête par voie électronique devant le Tribunal de commerce

Elle peut être portée devant la juridiction consulaire par voie de requête électronique sur le « tribunal digital » depuis le 28 février 2022

📩 Le demandeur remplit le formulaire cerfa n° n° 12946*02, et le formulaire A pour une injonction de payer européenne.

⚠️Devant le Tribunal judiciaire, la requête doit être déposée sous format papier au greffe.

1.2 - L’exigence d’un bordereau des documents justificatifs

Le décret du 11 octobre 2021 a substantiellement modifié l’article 1407 du code de procédure civile. En appui de la requête, il doit être assortie d’un bordereau des pièces qui accompagne les documents justificatifs produits. 


Elle doit toujours contenir les mentions : 

  • De l’article 57 CPC (auparavant, il était mentionné "article 58") ;
  • Le montant de la somme réclamée affiché précisément  ; 
  • Le décompte des différents éléments de la créance et son fondement. 
  • Le bordereau des documents justificatifs sert à répertorier tous les actes annexés produits à l’appui de la demande.

1.3 - La fourniture d’une copie certifiée conforme de la requête par le greffe

Autre nouveauté, à l’issue de la procédure, lorsqu’une ordonnance est rendue, le greffe remet au requérant une copie certifiée conforme en acceptation de la requête et de l’ordonnance (art. 1410 CPC).

💡Le greffe ne conserve plus aucun document que la requête soit acceptée ou rejetée, ils sont restitués (art. 1410 CPC).

II - Les 2 évolutions liées à sa signification 

La signification fait suite à la décision rendue par le Juge. Lorsqu’une ordonnance portant injonction de payer est rendue, le débiteur doit en avoir connaissance. C’est l’huissier de justice commissaire de justice ») qui en est chargé.

Pour accélérer la procédure (par le biais d’une dématérialisation de certains aspects) et en assurer la transparence, l’étape de la signification a évolué.

2.1 - La dématérialisation des documents annexés

Les pièces justificatives qui accompagnent la signification doivent être mises à disposition du débiteur par voie électronique (art. 1411 CPC). 

⚠️S’il n’est pas possible pour une cause qui lui est étrangère, l’huissier pourra les joindre à la requête signifiée (même article).

L’arrêté du 24 février 2022 a précisé les conditions de mise à disposition. Le commissaire de justice devra passer par la plate-forme sécurisée « mespieces.fr » (art. 2 de l’arrêté). Les documents sont disponibles 18 mois à compter de leur dépôt (art. 5).

Un coffre-fort électronique est mis à la disposition du débiteur par l’huissier. Le chemin d’accès est indiqué dans l’acte de signification.

2.2 - L’exigence du caractère apparent des mentions obligatoires dans la signification

Depuis le décret du 11 octobre 2021, l’article 1413 CPC précise que l’acte de signification doit indiquer de manière très apparente :

  • Le délai dans lequel l’opposition doit être formée ;
  • Le Tribunal devant lequel elle est portée ;
  • Et les modalités qui permettent l’opposition.

III - L’ordonnance revêtue de la formule exécutoire dès son prononcé

Il s’agit de l’évolution la plus marquante de la réforme entrée en vigueur le 1er mars 2022.

Aujourd’hui, l’ordonnance est revêtue de la formule exécutoire dès qu’elle est rendue (art. 1410 et 1411 CPC).

Le créancier n’a donc plus besoin de réaliser des démarches pour que l’ordonnance puisse être exécutée (art. 1423 et 1424 CPC abrogés par le décret du 11 octobre 2021). 

La procédure gagne en célérité et simplification. Désormais, la signification ne se fait plus en deux étapes.

⚠️ L’article 1422 CPC prévoit qu'après signification le délai d’opposition d’1 mois laissé au débiteur est suspensif d’exécution. Il faudra donc attendre que ce délai soit écoulé pour pouvoir éventuellement forcer l’exécution de l’ordonnance.


💡Nouveauté en ce qui concerne l’opposition : elle doit obligatoirement mentionner l’adresse du débiteur à peine de nullité (art. 1415 CPC).

La réforme a-t-elle une incidence sur la procédure civile d’injonction de payer ?

La procédure est désormais abrégée : la double étape liée à la formule exécutoire n’est plus requise. Les décrets tendent à la rendre plus accessible et en assurer une exécution plus efficace. 


Désormais, la procédure d’injonction de payer se limite à 5 étapes :

  • Étape 1 - La requête ;
  • Étape 2 - L’ordonnance rendue par le Juge ;
  • Étape 3 - La signification de l’ordonnance au débiteur ;
  • Étape 4 - L’opposition du débiteur (ou l’absence d’opposition) ;
  • Étape 5 - L’exécution forcée par le commissaire de justice (si le débiteur ne s’exécute pas lui-même).


💡Bien que l’ordonnance soit revêtue de la formule exécutoire dès son prononcé (art. 1410 CPC), elle ne constitue pas un titre exécutoire.

Photo de Kahina KHADRAOUI
Article de Kahina KHADRAOUI
Juriste
Rédactrice de contenus juridiques, diplômée d'un Master 2 universitaire en Droit de l'entreprise.